30 lycéens de retour d'Allemagne du Nord

Une trentaine de lycéens, garçons et filles des lycées Malraux d'Allonnes et Perseigne de Mamers sont rentrés le 9 avril d'un voyage de quatre jours en Allemagne du Nord où ils ont notamment visité le site de l'ancien camp nazi de Neuengamme près de Hambourg

 

La vie quotidienne à Neuengamme expliquée par Annick Eckel, une des deux guides des jeunes Sarthois

Pour la plupart des accompagnateurs, le voyage pédagogique 2019 de l'AERIS n'aura pas été une découverte. L'association avait déjà emmené des lycéens au camp de Neuengamme. Mais pour les jeunes Sarthois des lycées Perseigne de Mamers et Malraux d'Allonnes, qui jusque là n'avaient imaginé l'univers concentrationnaire nazi qu'à travers les livres d'Histoire, cette approche de la Déportation avec toute l'horreur qui l'a caractérisée a été un véritable choc. Bien que tous volontaires pour aller voir sur place ce à quoi pouvait ressembler un camp de concentration pendant la Seconde guerre mondiale, pas un n'a pu rester insensible aux images parfois insoutenables d'êtres humains qui n'en avaient plus que le nom et aux récits évoquant les sévices, les tortures et les crimes perpétrés en toute impunité par les nazis.

A Neuengamme, quand par une belle journée de printemps le soleil inonde le site de l'ancien camp débarrassé de ses miradors et de ses enceintes de barbelés electrifiés, où les baraquements des détenus ne sont plus matérialisés que par des emplacements empierrés, bien difficile de croire, quand on n'a pas encore 18 ans, qu'ici même, entre 1938 et 1945, 55000 personnes déportées de toute l'Europe furent assassinées à petit feu, soit environ la moitié de ceux, hommes et femmes, qui séjournèrent dans le camp, traités pire que des bêtes promises à l'abattoir. Un wagon à bestiaux sur une voie de chemin de fer marque l'endroit précis où les déportés s'apprêtaient à franchir les portes de l'enfer. Sur les fondations de l'ancien four crématoire, les restes de quelques bougies déposées par des familles. Plus loin, d'immenses bâtiments austères d'époque, en brique, comme ceux d'une sinistre caserne désaffectée. Pas un bruit, juste des chants d'oiseaux. Le groupe continue la visite. Des wagonnets rongés par la rouille au milieu d'anciennes glaisières, vestiges du travail forcé infligé aux détenus pour la fabrication des briques. Un vaste entrepôt vide, qui abritait lles ateliers de la briqueterie.

A Bergen Belsen, autre camp visité lors de la seconde journée, encore plus difficile d'imaginer les conditions de détention. Car ici, tout ou presque a disparu. En parcourant les prairies herbeuses traversées d'allées impeccablement entretenues, on s'arrête ça et là sur des stèles avec des noms de toutes nationalités, dont le plus célèbre, celui d'Anne Franck. Partout les arbres ont poussé autour des fosses communes surmontées de tumulus où sur chacun d'eux est précisé le nombre approximatif des morts enterrés. 1000 ici, 850 ailleurs... Au fond se dresse la colonne d'un monument du souvenir sur lequel sont gravées des phrases dans toutes les langues. C'est, en gros, tout ce qui reste de ce camp long de 4 km et large de 2, jonché de 15000 cadavres à l'arrivée des troupes britanniques.

Il n'y a plus aujourd'hui que les musées pour ressentir quelle fut l'horreur dans ces lieux peut-être hantés par les fantômes des morts

 

Dans la roseraie de Bullenduser Damm, devant les portraits des enfants assassinés

C'est toutefois au mémorial de Bullenhuser Damm, à Hambourg, que les lycéens ont pu mesurer le degré d'inhumanité auquel étaient parvenus les SS. Dans les sous-sols de l'école du même nom, on leur a expliqué que vingt enfants juifs, dont le plus jeune avait 5 ans, avaient été pendus par les nazis puis incinérés après avoir servi de cobayes pour des expériences médicales. Nombre des jeunes Sarthois ont été saisis d'effroi devant une telle atrocité. En passant devant les portraits des enfants disposés sur les murs de la roseraie, les larmes ont quelquefois coulé

"On nous avait dit que voir un ancien camp de concentration pouvait changer une partie de nous-même" a parfaitement résumé l'un des jeunes, "aujourd'hui je comprends pourquoi"

Philippe LAVERGNE

(Voir également "Le camp de Neuengamme", "les bulldozers de Bergen-Belsen", "Les innocents de Bullenhuser Damm", "Hommage aux Sarthois", "Ils ont dit", l'album photos et le témoignage de Roger Manceau, rescapé du camp de Neuengamme