Exposition à la sale Guedou

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Les victimes du nazisme

Dans cette exposition, vous pouvez voir des étapes de la montée du nazisme en Europe.
Nous avons retenu la photo d'une stèle. Les Allemands sont arrivés au Mans le 18 juin 1940. Un détachement de l'armée française est fait prisonnier à Sillé-Le-Guillaume.La convention de Genève sur la protection des prisonniers doit s'appliquer. Mais le lendemain, le 19 juin 1940, 14 soldats sénégalais sont extraits du groupe et fusillés sur-le-champ sans motif et sans procès. Il y a une dizaine de jours, je discutais avec un Silléen qui avait vu ces soldats la veille, le 18 juin, rien ne pouvait leur être reproché. Le lendemain de leur arrivée en Sarthe, des Nazis se rendent coupable d'assassinats collectifs racistes sur notre sol au nom de l'idéologie nationale-socialiste prônant une sélection biologique avec l'élimination de ceux qui font partie des "sous-races", de tous ceux qui ne sont pas de type aryen.
Face à ce régime nazi, les Sarthois ont résisté, soit par des actes individuels tels ceux de René Lecointre qui est fusillé le 7 décembre 1940, soit par des actes collectifs, soit en s'organisant en réseaux. Citons: CND Castille, FTP, ORA, BOA, OCM, Libération-Nord, Buckmaster, Sacristain, Alliance, Résistance et d'autres. C'est le peuple sarthois qui cache des Africains, des Juifs, des aviateurs alliés, des réfractaires, des évadés, des résistants, des Alsaciens… Ces Sarthois risquent pour eux et leur famille, le peloton d'exécution ou la déportation. Un soldat français de la Côte d'Ivoire est fusillé à Laigné-En-Belin le 26 octobre 1941. Pourquoi ? De nombreuses actions contre l'occupant sont organisées: sabotages, renseignements et bien d'autres. 
De nombreux résistants arrêtés sont torturés dans la sinistre maison de la rue des Victimes du Nazisme, à la Prison du Vert-galant et à la Prison des Archives. Le registre d écrou de cette dernière présenté ici donne une liste de plus de 450 d'entre eux "emboîtés par les Allemands",( la formule est de Paul Marchal, résistant manceau mort en Déportation) et la milice. Après les séances de matraquage, 98 d'entre eux sont fusillés et les autres sont déportés en camp de concentration ou d'extermination. 229 Sarthois ne sont pas revenus. 
Des documents sur certains de ces camps sont repris dans cette exposition. Monsieur Jacques Chesnier et l'AERIS les étudient et ils recherchent les Sarthois qui y ont été détenus. Nous voulons établir des liens entre les familles, les amis, les jeunes pour leur présenter les conditions de vie des déportés et leur espoir de redevenir des hommes libres. Cette première exposition à compléter pourrait être un support pédagogique dans un lieu de mémoire comme la Prison des Archives, bâtiment actuellement désaffectée. C'est un souhait de l'AERIS et la tenue de cette galerie augure de notre capacité à obtenir l'encadrement nécessaire pour assurer des animations. Cet enseignement de l'histoire sarthoise de cette période tourmentée sera complété par les enregistrements de témoignages de Déportés et de Résistants à l'aide de caméscopes numériques Ils serviront à la confection de C.D. en relation avec l'AERI nationale. 
Pour leur action depuis la fondation de l'AERIS au sein de l'association et pour la chaleur humaine qu'ils savent si bien donner, permettez-moi de remercier les anciens Déportés. A leur écoute, on sent que la souffrance des camps accompagne toute leur vie. Primo Levi, Déporté et poète, dans un poème intitulé "Le Survivant", composé en 1984, décrit cette blessure intériorisée:
Depuis lors, à une heure incertaine, 
Cette souffrance lui revient,
Et s'il ne trouve personne pour l'écouter
Le cœur lui brûle dans la poitrine.
Il revoit les visages de ses compagnons
Livides au point du jour,
Gris de ciment,
Voilés par le brouillard, 
Teintés de mort par les sommeils inquiets :
La nuit, ils remuent les mâchoires
Sous la lourde injonction des songes
Mastiquant un navet absent.

Pensons à ceux qui ont attendu le retour de l'être cher jusqu'au jour où ils ont su que ce retour ne se produira pas. Ils n'ont pas de tombe pour se recueillir. Seuls un Monument aux Morts et un Drapeau peuvent commémorer cette disparition.
Pour les nouvelles générations, un lieu de mémoire à la Prison des Archives est indispensable pour expliquer ces drames. Il répondra à l'avertissement lancé par les SS comme un défi aux détenus en 1945, défi transcrit par Primo Levi en tête de son essai : Les Naufragés et les Rescapés;
" De quelque façon que cette guerre finisse, nous l'avons déjà gagnée contre vous ; aucun d'entre vous ne restera pour porter témoignage, mais même si quelques-uns en réchappaient, le monde ne les croira pas. Peut-être y aura-t-il des soupçons, des discussions, des recherches faites par des historiens, mais il n'y aura pas de certitude parce que nous détruirons les preuves en vous détruisant. Et même s'il devait subsister quelques preuves, et si quelques-uns d'entre vous devaient survivre, les gens diront que les faits que vous racontez sont trop monstrueux pour être cru. […]
L'histoire des Lager, c'est nous qui la dicterons.

Presque 60 ans après cette ambition, c'est un devoir moral pour l'AERIS et les Elus de relever ce défi lancé aux Déportés sarthois. Merci de votre compréhension.Â